27 Décembre 2016
Aujourd'hui, j'ai vu en consultation une petite fille de trois mois.
On lui a diagnostiqué une surdité profonde, il y a quelques jours. Je l'ignorais jusque-là. Franchement je serais passée à côté si il n'y avait pas eu le dépistage systématique à la maternité. C'est une petite fille au développement tout à fait normal, et qui gazouille!...comme si de rien n'était.
Les parents parlent à peine le français.
J'ai examiné la petite, tout ça.
J'ai tenté d'échanger avec la mère autour de l'alimentation du sommeil, tout ça.
J'attendais qu'elle m'en parle, je n'arrivais pas à aborder le sujet.
Alors je l'ai regardée et j'ai fait silence.
Elle a fondu en larmes. Elle m'a montré un prospectus qu'on lui avait donné à l'hôpital et où était entouré au marqueur : "SURDITE PROFONDE"
Elle m'a dit : "C'est grave?"
Alors il a fallu expliquer en charabia ce que cela impliquait, les efforts qu'il serait nécessaire de fournir, les rendez-vous, les soins, les opérations...Mais que sa merveille de petite fille aurait une vie sociale, et familiale quasinormales. (On a encore cette chance, en PMI, de pouvoir prendre le temps)
Et, bien sûr, j'avais les larmes aux yeux.
Quand j'ai commencé à exercer la médecine, je m'obligeais à ne jamais pleurer devant les patients. C'était terrible ce que j'annonçais, ce que je voyais, ce que j'écoutais. Mais pleurer, ça aurait voulu dire que c'était encore plus grave. Si le docteur pleure, j'vous dis pas le pronostic.
Et puis, un jour, j'ai vu en consultation une maman qui m'a raconté que son fils était en soins palliatifs. Là, j'ai fait tout ce que j'ai pu, mais je n'ai pas réussi. J'ai pleuré avec elle.
Et elle m'a remerciée.
Elle m'a dit que ça lui faisait du bien d'avoir en face d'elle autant d'empathie. Bah ça, c'est pas un truc que j'avais appris à l'école des docteurs.
Bon, bien sûr, je sais me tenir, le plus souvent. Quand même.
Mais là, devant autant de désarroi, d'inquiétudes et d'angoisse face à l'inconnu, ...